Nettoyage des dents... effets spectaculaires !

Dans le même fil que le post précédent sur la modification de l'émail et de la dentine des dents fossiles.
Des expériences malheureuses par trempage de dents dans de l'acide chlorhydrique pur.

Je voulais que ça aille vite... et pour faire effervescence, ça a fait effervescence... mais, attention les dégâts !...



Une Série de dents des faluns de Tréfumel (22) traitées à l'acide chlorhydrique pur.
Seule la première n'a pas été plongée dans l'acide :

Sans traitement (juste rincée à l'eau) :

Galeocerdo aduncus (Agassiz) (Epargné) - Dent latérale :





G. aduncus plongée dans l'acide chlorhyrique pur (30 secondes) puis rincée à l'eau claire :




Une autre dent inférieure d'Hemipristis serra (Agassiz) même traitement.




Dent supérieure H. serra (Agassiz)




Détail des denticules :




Zoom sur les denticules :





Constatations sur la dent après traitement à l'acide chlorhyrique :

1 - Couronne
Ce qui saute au yeux, c'est son changement de teinte (plus clair) et son aspect satiné, plus "soyeux".
Sa couleur uniforme gris satiné la rend surnaturelle.
Son esthétique "en prend un coup"
2 - Racine
La racine n'est pas modifiée, ni dans son aspect, ni dans sa teinte.
La résistance globale du couple couronne/racine ne semble pas affectée.

Conclusions :
Modification de la structure de l'émail de la couronne (par quel processus ???)


Bon !... Ca, c'est pour le traitement AGRESSIF par acide chlorhydrique PUR.

Palliatif :
L'acide acétique (vinaigre blanc 8° de ménage) n'est pas aussi violent (heureusement !) de plus, rien n'empêche de le diluer...
C'est le procédé que j'utilise sur toutes mes dents provenant des faluns de Bretagne, hormis, bien sûr, les échantillons très fragiles ou exceptionnels.


Démonstration :
Voici par ordre, (pas trop triés), d'autres os, dents de daurades,de requins passés dans l'acide acétique pur, bien rincés et séchés, à l'ombre, sur un papier absorbant.

Tout "ce petit monde" a bien conservé son éclat et sa couleur naturelle, non ?...




Mais attention :
Il semblerait cependant, d'après Coco, Verso, Roger2 et d'autres amateurs d'un autre forum (trop occupés actuellement...) que les dents des faluns de Touraine/Anjou réagissent différemment même en présence d'un acide léger (voir post précédent).

La raison de cette réaction a donc été donnée sur les deux premiers liens de Brice.

Morale :

Si vous voulez nettoyer vos restes de vertébrés des faluns par trempage dans le vinaigre blanc :

1 - Contrôlez leur provenance (c'est ce que j'appelle la "traçabilité" appliquée aux fossiles... :-)...)

2 - Faites un essai sur un petit échantillon sans valeur.

Bonjour Placoïde,

Tes photos sont toujours superbes ! Tes deux clichés sur les détails des denticules sont .... y'a pas de mot !

On te prépare un petit envoi différencié pour les deux bassins de notre région, pour faire tes essais. Tu as oublié ton adresse en MP.

A +

Coco

Petite question naïve : est-il vraiment nécessaire de passer à l'acide ?

Après tout, la première rincée juste à l'eau n'est pas si mal, et si des adhérences subsistent sur certaines dents, p'têt qu'on peut les laisser, ou bien faire un nettoyage mécanique uniquement...

C'est vrai que je préfère le nettoyage à la lame (couteau ou lame de scalpel usée) très "couchée" sur le fossile pour ne pas l'attaquer, mais juste décoller le falun. Mais parfois, cela ne suffit pas.

Cette préférence vient de mes déceptions avec mes essais davantage chimiques.

Coco

Bonsoir,

Pulsar a écrit:

Petite question naïve : est-il vraiment nécessaire de passer à l'acide ?

Après tout, la première rincée juste à l'eau n'est pas si mal, et si des adhérences subsistent sur certaines dents, p'têt qu'on peut les laisser, ou bien faire un nettoyage mécanique uniquement...

Ben oui ! après tout....
... c'est selon.... le goût de chacun.

Plus sérieusement :

Je me laisse séduire par la solution de facilité.
En plus du temps à passer pour nettoyer à la main, une à une, la sous-face des dents plates et ovales de Sparus auratus lorsqu'elles sont encroûtées d'un dépôt bien adhérent, c'est un risque de casse à chaque instant que je ne veux pas prendre.
De même pour certaines dents de Myliobatidae.

Pour moi l'emploi de l'acide chlorhydrique est à proscrire, trop violent et difficilement contrôlable; au contraire de l'acide acétique qui est plus lent à réagir et nettement moins agressif. Cela n'exclue pas d'alterné sur les gros spécimens, acide acétique et attaque mécanique usuelle et de tamponner les solutions pour éviter une attaque sur les dents.

L'attaque acide est particulièrement efficace sur les fractions fines carbonatées. C'est surtout dans ce contexte que je l'utilise, pour les fractions fines (entre 0.3 et 1 mm) de craie, calcaire ou marne. Le but final étant d'obtenir un concentré facilement triable à la binoculaire, sans carbonates.

Pour certaines dents, très graciles j'opte aussi pour cette solution attaque acide, car le dégagement mécanique devient trop hazardeux en comparaison de l'acide.

L'ajout en dose infime d'acide fort (type HCl) dans un acide faible, permet de prolonger l'attaque et de régénérer le processus (si mes souvenirs de chimie sont encore d'actualité). Mais je n'ai jamais expérimenté la chose, à vérifier.

Toutefois La question de pulsar n'est pas si naîve

Citation :

Après tout, la première rincée juste à l'eau n'est pas si mal, et si des adhérences subsistent sur certaines dents, p'têt qu'on peut les laisser, ou bien faire un nettoyage mécanique uniquement...

En effet on observe souvent sur les dents des éléments "colonisateurs" qui offre des informations précieuses sur le biotope et les paléoenvironnements de dépôts. (encroûtements d’ algues; bryozoaires, empreintes de pieds d'organismes divers, coraux....) Ces éléments généralement carbonatés (parfois en pyrite) sont bien sur effacer avec les attaques acides.

Concernant la modification de l'aspect dentaire après l'attaque acide, celle-ci est liée probablement à la nature complexe de l'émail des néosélaciens. Il y a de nombreux articles de Cuny sur la question.
Une attaque acide avec HCl permet justement de connaître la nature des différents niveaux de l'émail (jusqu'à 3) et permet dans certains cas d'apporter des informations à partir de photos SEM, des données sur l'origine de certains élasmobranches énigmatiques.


Cuny, G. (1996). "Could we study isolated primitive shark teeth without a SEM ?" Palaeontological Association: xiii-xiv.

Cuny, G. (1997b). "Enamel ultrastructure of Upper triassic shark teeth." Journal of Morphology 232(3): 245.

Duffin, C. J. and G. Cuny (2008). "Carcharopsis prototypus and the adaptations of single crystallite enameloid in cutting dentitions." Acta Geologica Polonica 58(2): 181-184.

Gillis, A. J. and P. C. J. Donoghue (2007). "The Homology and Phylogeny of Chondrichthyan Tooth Enameloid." Journal of Morphology 268: 33-49.

Iwata, K. and S. Uozumi (1971). "A comparative study of ultrastructure in fossil collagen; studies on calcified tissue. Part III." Journal of the Geological Society of Japan 72(2): 71-76.

Orvig, T. (1977). A survey of odontodes (Dermal teeth) from developmental, structural, functional and phyletic point of view. Problems in vertebrate evolution. S. M. Andrews, R. S. Miles and A. D. Walker, Linean Society of London, Symposium. 4: 53-75.

Rees, J. and G. Cuny (2007). "On the enigmatic neoselachian Agaleus dorsetensis from the European Early Jurassic." GFF 129: 1-6.

Bonsoir fm,

L'essai d'Hcl sur les dents n'était qu'un essai, je te rassure !

fm a écrit:

...........Toutefois La question de pulsar n'est pas si naîve

Citation :

Après tout, la première rincée juste à l'eau n'est pas si mal, et si des adhérences subsistent sur certaines dents, p'têt qu'on peut les laisser, ou bien faire un nettoyage mécanique uniquement...

En effet on observe souvent sur les dents des éléments "colonisateurs" qui offre des informations précieuses sur le biotope et les paléoenvironnements de dépôts. (encroûtements d’ algues; bryozoaires, empreintes de pieds d'organismes divers, coraux....) Ces éléments généralement carbonatés (parfois en pyrite) sont bien sur effacer avec les attaques acides.

Effectivement, dans certains gisements, l'on peut observer, sur certaines dents ou ossements des "organismes ou traces d'organismes colonisateurs".
Je me souviens que Thanet nous avait présenté, il y a quelques mois, une dent de sélacien sur laquelle de petites huîtres s'étaient collées.

Pour ma part, ce sont sur des côtes de Metaxythérium de Tréfumel que j'ai pu observer un phénomène d'encroûtement par une colonie de bryozoaires, (il y a un post à ce sujet).
Par contre, sur aucune des dents de poissons récoltées dans cette même localité, je n'ai pu observer le même phénomène.

fm a écrit:

........Concernant la modification de l'aspect dentaire après l'attaque acide, celle-ci est liée probablement à la nature complexe de l'émail des néosélaciens. Il y a de nombreux articles de Cuny sur la question. Une attaque acide avec HCl permet justement de connaître la nature des différents niveaux de l'émail (jusqu'à 3) et permet dans certains cas d'apporter des informations à partir de photos SEM, des données sur l'origine de certains élasmobranches énigmatiques..........

Justement, quels sont les échanges qui se produisent au contact émail/Hcl pour que la ou les dents changent d'aspect de la sorte ?
J'essaierai de l'Hcl sur des dents de sélaciens du Lutétien Inf. du BP pour voir le résultat !...

En tous cas, merci pour la bibliographie !